Cet article a pour thème la gestion des blessés de l’avant dans le cadre de la montée en puissance du concept de numérisation de l’espace de bataille. Dans ce cadre, les auteurs présentent le projet Cortim, prix de l’audace 2006 au titre du Service de santé des Armées. À partir d’une actualisation des connaissances quant aux situations actuelles, Cortim conduit à proposer le concept innovant de régulation médicale de théâtre (RMT). Cortim et la RMT constituent un axe de réflexion sur lequel travaillent le Service de santé des Armées, la Délégation générale de l’armement et l’état-major de l’Armée de terre.
La gestion des blessés de l'avant
Gestion des blessés, flux d’informations et décisions de régulation
Forward field casualty
The theme of this article is the care of casualties in the field from the perspective of the increasing digitisation of the combat zone. The authors describe the medical data-handling project CORTIM, for which the Armed Forces Medical Service (SSA) was awarded the prize for bold innovation in 2006. Starting from an updating of knowledge of current situations, CORTIM has created a Theatre Medical Control System (RMT). The project and RMT are being followed closely by the SSA, DGA (the French armaments agency) and Army Staff.
L’acceptation des pertes ou, au contraire, l’intolérance qu’elles suscitent chez les différents acteurs d’influence d’une nation, peut conduire ou non, au succès d’une opération militaire. Cette réflexion de niveau stratégique se traduit, au niveau tactique, par la gestion d’un processus global de prise en charge médicale, nécessitant de très nombreuses ressources en hommes et en matériels. Or, le facteur temps constitue un élément-clé de cette prise en charge. En effet, d’une part, le pronostic des blessés graves est lié à une mobilisation rapide et adaptée de ces ressources, et d’autre part, le maintien de la capacité opérationnelle des unités combattantes dépend du délai d’évacuation des blessés de la zone des combats.
Afin de mieux gérer un volume élevé de ressources dans les plus brefs délais, pour augmenter la survie des blessés en opération, le projet Concept d’organisation, de recueil et de transmission de l’information médicale (Cortim) a été mis en œuvre. Ce projet a débuté en se fondant sur le postulat suivant : dans le contexte actuel de la numérisation de l’espace de bataille, l’effort doit être porté sur le management de l’information médicale afin d’aboutir à un engagement plus adapté des moyens sanitaires et donc une amélioration de la qualité de la prise en charge. Après quatre années de recherches, Cortim a débouché sur le fait que mieux gérer l’information n’était pas seulement un problème technique, mais conduisait à faire évoluer en profondeur le processus de prise en charge des blessés. En effet, l’accès à une information globale permet de dépasser la seule vision logistique de ce processus au profit d’une Régulation médicale de théâtre (RMT). Les implications de la RMT sont alors nombreuses comme nous allons le décrire.
Les enjeux actuels
Les conditions d’engagement de nos troupes ont évolué très rapidement ces dernières années. Ainsi, les opérations de maîtrise de la violence avec des pertes prévisibles faibles constituent aujourd’hui la norme. Cependant, des crises localisées peuvent survenir et générer un afflux ponctuel de blessés comme ce fut le cas en Côte d’Ivoire en 2004. Le risque d’un afflux de blessés susceptible d’outrepasser momentanément la capacité de la chaîne santé doit donc être envisagé dès la conception d’une opération. Cependant la gestion de ces pics d’activité est d’autant plus difficile à organiser qu’ils surviennent de façon aléatoire. Ce risque devient une nouvelle contrainte de la médecine de l’avant. De plus, force est de constater que les conditions opérationnelles ne sont plus dérogatoires. Ainsi, l’amélioration de la prise en charge et la responsabilité médico-légale impliquent de personnaliser les soins prodigués à chaque blessé. Dans ce nouvel environnement, le traitement de masse hérité de la période de la guerre froide n’apparaît plus adapté. Constatant le développement des technologies de l’information dans le domaine de la santé où elles sont opérationnelles, nous nous sommes posé la question suivante : « comment la gestion des blessés de l’avant, compte tenu de ses nouvelles contraintes, peut-elle être améliorée par l’utilisation des outils numériques ? ».
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