Cette étude a été conduite au cours de deux détachements opérationnels au Kosovo, en 2002 et 2007, dans le cadre des actions civilo-militaires. Il s’est agi de rechercher quelles sont les motivations qui animent un militaire de réserve qui accepte d’ajouter une clause de volontariat « opérations extérieures », à son engagement à servir dans la réserve opérationnelle (ESR). Si l’on réunit les résultats des deux enquêtes, on peut constater que ce sont des valeurs « positives » qui animent principalement ces militaires : « goût de l’aventure » ; « souhait de vivre en ambiance militaire » ; « souhait de servir ».
La réserve en Opex
The reservist on external operations
This study was conducted during two operational tours, in Kosovo in 2002 and 2007, in a context of civil-military action. It involved looking into the motives of reserve military personnel who accept the addition of a ‘volunteer for external operations’ clause to their engagement to serve in the operational reserve (ESR). Combining the results of the two surveys, it can be seen that these personnel are motivated primarily by ‘positive’ values: ‘taste for adventure’, ‘desire to live in a military atmosphere’ and a ‘desire to serve’.
En France, les choses sont maintenant fixées dans la loi : les réservistes opérationnels ne sont recrutés que pour être employés, et une partie des « réservistes citoyens » aurait vocation à les relever en cas de défaillance. Cette consécration ne lève par l’hypothèque la plus lourde, celle du recrutement : il faut être capable de disposer en permanence d’un stock de 100 000 réservistes opérationnels. Sur la base d’une carrière de vingt années, cela signifie un flux annuel de 5 000 au minimum, et sans doute plus en tenant compte d’une « évaporation naturelle ». En réalité on ne peut plus aujourd’hui raisonner en carrière (point de vue implicite du recruté) mais en contrat à durée déterminée (ESR), de sorte que la question devient celle du renouvellement de 30 000 contrats par an (sur la base de contrats durant en moyenne trois ans, ce qui est relativement optimiste). Et donc vient la double question : pourquoi viendraient-ils et comment les faire venir ?
Certes, il est toujours possible de compter sur la disponibilité, c’est-à-dire sur les anciens militaires d’active venant de quitter le service. La loi de 1999 révisée leur impose cinq années de disponibilité après cessation du lien au service ; mais voudra-t-on rendre cette disponibilité effective ? Si ce n’est pas le cas, ce qui est probable, ces disponibles tombent dans le vivier général des réservistes, au sens où les mêmes questions se posent à leur propos. C’est pourquoi des services de recrutement ont mis en avant des avantages en numéraire ou en nature pour tenter de capter l’offre latente de travail à temps partiel : aide à la formation scolaire ou universitaire ; soldes attrayantes et accès aux autres avantages réservés aux militaires. Mais les considérations économiques ne suffisent pas à motiver l’engagement. Surtout lorsque l’observateur est réserviste lui-même, il est naturellement porté à penser, sur la foi de son expérience, que les rétributions recherchées en contrepartie d’un engagement sont aussi morales que matérielles. Encore faut-il savoir de quel engagement il s’agit. Certes, un réserviste, comme un militaire d’active, a pour ultime vocation de participer au combat ; mais s’agissant aujourd’hui de prendre part à des opérations extérieures, il s’avère que le réserviste n’est rappelable que s’il s’est déclaré volontaire. Il existe donc deux types d’engagement : celui qui consiste à participer au fonctionnement quotidien, de temps de paix, du service de défense et celui qui conduit à se retrouver sur un théâtre d’opérations et à assumer les risques inhérents à cette situation. On peut penser que les motivations ne sont pas tout à fait les mêmes dans l’un et l’autre cas.
La présente étude tente, très modestement, de fournir des éléments de test pour cette conjecture. Elle a été menée, par hasard, du fait d’une présence sur un théâtre d’opérations : le Kosovo au cours de l’été 2002, avec la possibilité d’interroger les autres réservistes présents (1). Un autre hasard opérationnel a fait que la même expérience a pu être renouvelée pratiquement cinq ans après, et presque dans les mêmes conditions.
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