On ne peut parler du pacifisme sans d’abord parler de ces concepts politiques que sont la paix et la guerre. Aussi longtemps qu’un peuple veut rester libre c’est-à-dire disposer souverainement de son existence, et qu’il veut préserver son identité c’est-à-dire garder la possibilité de maintenir ou de créer ses propres valeurs, sa culture originale, sa propre manière d’habiter le monde, ce peuple existe dans la sphère du politique.

La philosophie politique nous montre ainsi que, si un peuple entend rester une nation et ne pas être une simple multitude d’individus livrée aux convoitises étrangères, il doit savoir opérer la distinction entre amis et ennemis et distinguer la nature et l’origine des menaces. La société est donc la donnée du politique comme le besoin est la donnée de l’économique. Lorsqu’une société tend à affirmer sa liberté et son identité, elle devient un corps politique (peuple, nation, État, République…) qui vise à la concorde intérieure par la solidarité entre ses membres, et à l’indépendance extérieure par sa défense. Parler d’indépendance implique donc l’existence d’ennemis réels ou virtuels ; c’est donc reconnaître le caractère différentiel sinon conflictuel des relations entre unités politiques. Ces relations oscillent sans cesse entre la paix et la guerre qui représentent l’état minimum ou l’intensification maximale du conflit.

La paix et la guerre ne sont que des modes du rapport politique à l’autre

La paix occulte le caractère conflictuel des relations de politique extérieure, elle ne les supprime pas, car il faudrait alors une entière communauté de destin entre les protagonistes, et celle-ci ne pourrait advenir que si disparaissait le pluralisme des sociétés et des peuples.