L'auteur a inauguré en 1996 le poste d’officier de liaison français auprès du centre école du renseignement de l’armée de terre américaine à Fort Huachuca (Arizona) l’US Army Intelligence Center. À la fin de son affectation, il a souhaité nous faire connaître ses observations sur les qualités et les défauts du système de renseignement américain. Cet article est particulièrement instructif.
Contre-renseignement, contre ingérence et maîtrise de l'information
C’est un lieu commun que d’affirmer l’avance culturelle anglo-saxonne dans le renseignement. Le métier des « seigneurs » n’est pas aux États-Unis réservé exclusivement à quelques agences gouvernementales secrètement nichées sur les rives du Potomac.
L’armée de terre américaine donne incontestablement une place plus privilégiée à la fonction opérationnelle renseignement que ne lui accorde actuellement la nôtre. Ainsi le Cemat américain dispose tout à la fois d’un adjoint opérations et d’un adjoint renseignement (aujourd’hui première femme de l’US Army à accéder au rang de général de corps d’armée). Le renseignement militaire est aussi une arme au même titre que l’infanterie ou l’artillerie. L’US Army y consacre aujourd’hui 3 % de ses effectifs et lui attribue un budget suffisant pour qu’elle se dote de certains des systèmes les plus performants de la technologie du « tout numérique ». Cette arme du Military Intelligence (MI) possède à Fort Huachuca, en Arizona, sa propre école d’application où sont dispensés des savoir-faire développés depuis trente ans ; mais l’Usaic (1) réfléchit aussi à la doctrine du MI, élabore ses futurs systèmes d’armes et met au point une politique cohérente de gestion de ses personnels.
Le poste d’officier de liaison français créé en 1996 auprès de la maison mère du renseignement terre américain est un observatoire privilégié pour se pencher aujourd’hui sur l’une des spécialités les plus mystérieuses du MI : le Counterintelligence (CI). Il serait hasardeux de traduire simplement cette notion en contre-renseignement ou en contre-ingérence. La doctrine du CI est liée au vaste domaine de la protection des forces. Cependant, le CI va bien au-delà et rejoint un concept qui fait ces dernières années bouillonner tous les cercles de réflexion des forces armées américaines : celui de la maîtrise de l’information ou des Information Operations (IO).
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