La France et l’Amérique latine
Le prochain voyage du Général de Gaulle en Amérique latine attire à nouveau l’attention sur cette région du monde. À la vérité, cette attention avait été sollicitée, ces derniers mois, par divers développements assez vifs qui se sont produits en tel ou tel pays du continent sud-américain. Les coups d’État qui, de temps en temps, affectent la vie politique de l’un ou l’autre ne surprennent pas outre mesure l’observateur étranger ni ne l’émeuvent. Ils apparaissent comme une manifestation habituelle du tempérament des populations qui s’y livrent. D’aucuns, par contre, s’étonnent de voir un ensemble de pays qui, dans un passé non lointain, étaient considérés comme riches et prospères, souffrir des maux de pauvreté au point de s’ouvrir aux entreprises subversives des pays de l’Est relayés par Fidel Castro. Et ils voient les États-Unis, dont l’influence paraissait là déterminante et solidement ancrée, se heurter à une mauvaise volonté que l’assistance généreuse qu’ils dispensent ne parvient pas à désarmer.
À la vérité, toute appréciation globale portée sur l’Amérique latine est nécessairement sommaire. Ce continent, s’il se présente géographiquement comme un tout, encore que le Mexique le prolonge au-delà de l’isthme dans l’hémisphère nord, est plus divers qu’il n’apparaît à distance et les pays qui le composent ont à faire face à des problèmes de différents ordres qui, s’ils se retrouvent ici et là, ne se présentent pas nécessairement de la même manière en ces différents lieux.
Sans doute ont-ils des traits communs. Le principal est qu’ils sont tous issus de la colonisation. Un autre est que cette colonisation était le fait de pays latins, mais dès ce point une différence apparaît aussitôt, une distinction est aussitôt à faire entre le Brésil, qui fut pris en charge par le Portugal, et le reste du continent, qui fut couvert par l’Espagne. Un autre encore est que tous se sont affranchis de cette colonisation, mais là encore il ne s’agit pas d’un processus unique, les colonies espagnoles ayant conquis l’indépendance par les armes au début du XIXe siècle, alors que le Brésil, plus pacifiquement, la vit établir en 1822 par proclamation de son gouverneur portugais, qui se trouvait être le propre fils du Roi du Portugal et devint le premier souverain du nouvel Empire. Enfin, les libertés conquises le furent, dans l’ensemble du continent, par les éléments issus de la race colonisatrice, mais une différence se retrouve dès que l’on aborde le gros de la population actuelle, où l’on trouve au Brésil une très importante proportion d’Africains importés par la traite alors que dans les pays andins on voit, en même place, les populations indiennes autochtones jadis assujetties par les conquérants espagnols.
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