Dans le précédent numéro, l'auteur a attiré l'attention sur la résurgence d'un mouvement unitaire dans l'Islam contemporain. La décolonisation du monde islamique s'est faite sous le signe d'un nationalisme qui persiste, sans contredire cependant la reconstruction d'une communauté musulmane. Phénomène de circonstance ou réalité géographique de demain : la Nation islamique ?
La « Nation islamique » : une réalité géopolitique de demain ? (II) Des structures panislamiques modernes
La Conférence islamique, dont le secrétariat général permanent est installé à Jedda (1), est l’organisme politique et de décision du panislamisme contemporain. Y siègent côte à côte les dirigeants des quarante et un États musulmans et de l’O.L.P., ainsi que des observateurs du Nigeria, de la communauté turque de Chypre et du Front de Libération des Philippines du Sud. L’Égypte a été « suspendue » en 1979 et l’Afghanistan soviétisé en 1980. Des hommes de formations intellectuelles diverses, occidentale ou musulmane classique, se côtoient, représentant des régimes très différents, monarchies conservatrices ou républiques à économie de marché, démocraties populaires, républiques islamiques (Comores, Iran, Mauritanie, Pakistan), pays du socialisme arabe baassiste (Syrie, Irak) ou marxiste (Sud-Yemen), États à constitution laïque mais à population à 90 % musulmane (Indonésie, Turquie), même un État potentiel, l’O.L.P.
C’est assurément le plus grand forum politique après l’O.N.U. Certes, pas plus que celle-ci, la conférence islamique n’a fait progresser le problème n° 1 du monde musulman, la Palestine. En son sein, comme dans toutes les assemblées internationales, se reflètent les tendances divergentes de ses membres. Mais des compromis sont dégagés : on l’a vu au cours des deux réunions de la conférence tenues en 1980 à Islamabad à propos de l’affaire afghane et de la médiation islamique. L’organisation a le mérite d’exister et de fonctionner, alors que dans un secteur particulier de l’Islam, l’idéologie raciale et laïcisante de la « nation arabe », très en vogue dans les années 50-60, n’a jamais rien donné de positif (2).
La voix de sept cents millions de musulmans, qui seront plus d’un milliard d’ici vingt ans, peut se faire entendre sur des affaires concernant le monde de l’Islam (3). Son opinion n’est pas tenue pour négligeable par les deux superpuissances qui essaient de se l’approprier, bien que la tendance actuelle de la conférence soit plutôt de refuser un alignement sur les « impérialismes de l’Est ou de l’Ouest » (communiqué des réunions d’Islamabad).
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