Réponse au général Bernard de Bressy, suite à son article paru dans la revue Défense nationale et sécurité collective de mars 2006 : « Des frontières de l’Europe ».
À propos « des frontières de l'Europe »
Concerning Europe’s frontiers
A reply to General Bernard de Bressy and his article ‘Europe’s frontiers’ which appeared in the March 2006 issue of Défense Nationale.
Dans le numéro de Défense nationale et sécurité collective de mars 2006, le général de Bressy aborde la question, peut-être l’une des plus importantes de notre époque, « des » frontières de l’Europe. Pour aller à l’essentiel, le général de Bressy apporte une réponse au pluriel. La question du singulier ou du pluriel est plus essentielle encore que celle du tracé ; savoir « où » passera la frontière. L’Ukraine et la Biélorussie d’une part, et la Turquie de l’autre, seront-elles dedans ou dehors ?
La réponse du général de Bressy est en apparence séduisante par son modernisme. Sa démonstration tient dans deux propositions fortes. La première est qu’il existe différentes « frontières » européennes qui ne se recoupent pas : frontières linguistique, culturelle, civilisationnelle, diplomatico-stratégique et, bien sûr, économique. La seconde est que cette pluralité est bénéfique et qu’elle est l’indice d’une nouvelle forme de souveraineté que l’Europe est en train d’inventer et qui rompt avec le principe territorial caractéristique de la modernité.
Carl Schmitt avait théorisé avec la force que l’on connaît la logique territoriale du système westphalien des États : « Tout ordre fondamental est un ordre spatial. Parler de constitution d’un pays ou d’un continent, c’est parler de son ordre fondamental, de son nomos. Or, l’ordre fondamental, le vrai, l’authentique repose essentiellement sur certaines limites spatiales. Il suppose une délimitation, une dimension, une certaine répartition de la terre. L’acte inaugural de toute grande époque est une appropriation territoriale d’envergure. Tout changement important de la face du monde est inséparable d’une transformation politique et donc, d’une répartition de la terre, d’une appropriation territoriale nouvelle » (1).
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