Présentes en Afghanistan depuis presque trente ans, les organisations humanitaires sont de plus en plus fréquemment prises pour cibles. Symptomatiques du changement de stratégie de la part des taliban et leurs affidés, ces attaques soulèvent de nouvelles questions sur la continuité de l’action humanitaire et, au-delà, de l’implication de la communauté internationale en Afghanistan. L’article analyse les impacts de la détérioration de la sécurité sur l’action humanitaire et met en évidence les conditions nécessaires pour que les ONG puissent continuer d’intervenir en Afghanistan. Enfin, il montre que les attaques contre les humanitaires ont des conséquences potentiellement dévastatrices sur les forces françaises opérant dans le pays.
Afghanistan : humanitaires en danger
Aid workers in danger
Present on the ground in Afghanistan for nearly 30 years, humanitarian aid organisations increasingly find themselves targets. Symptomatic of a change in strategy on the part of the Taliban and its accomplices, these attacks raise questions on the continued presence of aid organisations, and more broadly on the international community’s involvement in Afghanistan. This article examines the impact of the deteriorating security situation on aid organisations and suggests the conditions necessary for NGOs’ continued intervention in the country. Finally, it shows that the attacks on these organisations have potentially disastrous consequences for the French forces operating there.
Aujourd’hui, plus de 1 200 organisations non gouvernementales (ONG), dont près de 300 ONG internationales, sont en Afghanistan. Cela représente 25 000 à 35 000 travailleurs humanitaires, étrangers ou afghans (1). Depuis la chute des taliban en 2001, la communauté internationale a dépensé plusieurs milliards d’euros d’aide humanitaire. L’Union européenne par exemple, via son service d’aide humanitaire de la Commission européenne (connu sous son acronyme anglais Echo, European Commission Humanitarian Office) a alloué à l’Afghanistan près de 100 M€ d’aide depuis 2004. Cette aide internationale concerne tous les secteurs de la société : éducation, santé, lutte contre la pauvreté, soutien aux femmes, reconstruction d’infrastructures, déminage, réinsertion dans la société, etc.
Par ailleurs, au-delà de l’aide purement humanitaire, la communauté internationale s’attache à reconstruire le pays, d’une part, en mettant en place et en soutenant les institutions nationales et locales, et d’autre part, en luttant militairement contre les taliban, chefs de guerre, trafiquants de drogue et criminels. Cependant, malgré l’implication que cela signifie notamment en termes de ressources financières et humaines, on ne peut que regretter un bilan en demi-teinte.
En dépit de la tenue d’élections présidentielles et législatives en 2004 et 2005 et le développement démocratique des institutions, on entend beaucoup parler, depuis la France, d’explosions, d’attaques, de combats, de morts. Effectivement, le récent enlèvement des deux humanitaires français travaillant pour l’ONG Terre d’enfance rappelle encore une fois durement à la communauté internationale les difficultés à réaliser des projets humanitaires dans ces conditions. La question qui se pose alors est celle de la continuité de l’action humanitaire et, au-delà, de l’implication de la communauté internationale en Afghanistan.
Il reste 89 % de l'article à lire
Plan de l'article