Afin de pouvoir faire avancer la PESD, la France aura besoin du soutien de l’Allemagne. Or, Berlin n’est pour l’instant pas encline à donner son aval aux priorités « sécurité et défense » de la PFUE. Actuellement, France et Allemagne diffèrent non seulement par rapport à la révision de la Stratégie européenne de la sécurité et à l’adaptation des mécanismes de financement des opérations militaires de l’UE. Plus important encore, Berlin garde des doutes sur l'orientation française pour la la PESD et sur ses motivations pour réintégrer pleinement l’Otan.
La coopération franco-allemande à l'épreuve
Franco-German cooperation under strain
To take ESDP forward, France will need Germany’s support. Yet for the moment Berlin is not inclined to give its backing to the French European presidency’s priorities on security and defence. Currently, France and Germany differ not only over revision of the European Security Strategy and reforming the mechanism for financing EU military operations. More importantly, Berlin has reservations on the direction in which France wishes to take ESDP and its motives for returning to NATO’s integrated military structure.
Créer « une Europe qui agit pour répondre aux défis d’aujourd’hui » est l’ambition que la France affiche pour sa Présidence européenne (PFUE) (1). Parmi les quatre priorités du programme de travail des six prochains mois figure la relance de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD). L’orientation centrale de la présidence française en matière de défense sera le renforcement des capacités militaires disponibles en Europe. Tandis que les trois autres sujets prépondérants — l’immigration, le pacte énergie-climat et la politique agricole commune — s’inscrivent dans la continuité des présidences précédentes et font donc l’objet d’un consensus européen quant à leur mise à l’agenda, le sujet de la PESD est la seule initiative proprement française. Il émane directement de la volonté de Paris de faire de l’UE un acteur mondial de premier plan.
Afin de pouvoir parachever le dossier PESD avec succès, la France aura besoin d’un soutien fort de ses partenaires qui doivent prendre en compte cette priorité française. Or, le partenaire privilégié de la France depuis 1998 et le Sommet de Saint-Malo, le Royaume-Uni est absent, en raison d’un Premier ministre Gordon Brown faible et peu enthousiaste pour la PESD ainsi qu’une paralysie consécutive à l’issue du référendum irlandais. C’est aussi pour cette raison que dès l’annonce du « non » irlandais au Traité de Lisbonne, Nicolas Sarkozy s’est tourné vers l’Allemagne pour affirmer sa stratégie de gestion de la crise politico-institutionnelle qui consiste à mener à leur terme toutes les ratifications nationales. Cette stratégie présente à la fois l’avantage d’être la seule crédible, en l’absence de dispositif permettant de contourner la non-ratification d’un des 27, et de constituer le scénario préservant le mieux la marge de manœuvre de la France pour poursuivre les priorités de sa présidence du Conseil européen. Or, en matière de PESD, le soutien de l’Allemagne n’est pas assuré, quand bien même le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale affirme : « la coopération franco-allemande, qui a joué un rôle historique, dans l’Europe de la défense, constituera l’un des moteurs des initiatives nouvelles » (2). Pour Berlin, trop d’incertitudes planent encore sur ce dossier-clé de la PFUE : quelle est pour la France la « finalité » de la PESD et comment Paris veut-il gérer les relations Otan-UE dans la politique de sécurité et de défense ?
Ainsi l’annonce par la France de la révision de sa politique vis-à-vis de l’Otan et son intention de réintégrer pleinement l’organisation atlantique n’ont pas suscité en Allemagne l’enthousiasme espéré par les autorités françaises et ne semblent pas avoir offert, pour l’instant, à la France le surcroît de marge de manœuvre souhaité dans le dossier de l’Europe de la défense. Alors même, qu’il y a quelques mois les attentes étaient fortes en Allemagne sur la PFUE, y compris sur la PESD (3), le peu de réactions au Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale atteste d’un certain attentisme allemand.
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