L’étude que l'auteur présente aujourd’hui est particulièrement bienvenue car elle précise avec objectivité et mesure un certain nombre de points qui suscitent bien des polémiques.
Présence d'un islamisme de pouvoir
Sommes-nous entrés dans une période où l’islamisme est déjà devenu une composante nécessaire des gouvernements d’États arabes, donc de ces États eux-mêmes ? Pour répondre à cette question, un bref rappel est d’abord nécessaire. L’islam, religion, édicte aussi une loi qui maintient les croyants dans la voie de Dieu en organisant la bonne conduite de leur communauté sur terre. L’exercice du pouvoir n’a jamais été théoriquement séparé d’un magistère religieux et juridique que résume la formule dîn wa dawla, « religion et État », religion et souveraineté. Aucun des États arabes ne renie aujourd’hui cette règle. Même si la plupart des gouvernants ne l’évoquent qu’avec discrétion, ils laissent aux hommes de religion la possibilité d’en parler constamment. Or, l’enseignement des oulémas — à quelques exceptions près — est toujours attentif à en diffuser le principe parce qu’il garantit leur autorité juridique et morale dans la société. C’est le respect de ce lien entre la religion et l’État qui contribue aussi à nourrir les formes idéologiques contemporaines communément appelées « islamisme » ; elles entendent définir la pratique du pouvoir politique par le contenu strict de la révélation coranique.
L’islamisme se justifie par une recherche de la vérité et de la pureté ; il veut les retrouver dans les fondements de l’islam. Ce fondamentalisme prône, dans ce but, une interprétation rigoriste du droit islamique, de la charia. Il se réclame de la transcendance de l’appel coranique pour célébrer l’universalité de l’islam, mais, en même temps, pour défendre sa vitalité identitaire et par conséquent la personnalité des musulmans. Il accuse, en effet, les Occidentaux, souvent nommés « croisés » ou « impérialistes », d’agression contre le monde de l’islam ; il voit celui-ci assiégé de partout. Aussi les militants islamistes considèrent-ils qu’ils ont pour devoir d’appeler les croyants à s’unir pour sauver le rayonnement universel de l’islam et pour rendre inexorable le salut qu’il apporte à tous les hommes.
L’islamisme sème autant d’inquiétudes que d’espérances. Les unes et les autres ont des répercussions politiques, sociales et mentales. Elles prolongent des tensions religieuses. Elles se donnent également des raisons économiques. Comment ? Où ? Auprès de qui ?
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