Politique et diplomatie - La concurrence, enjeu planétaire ?
Tout confirme, en cette fin de XXe siècle, un bouleversement de la politique internationale. Les vieux débats sur la souveraineté, l’indépendance, les jeux d’équilibre et d’alliance ne disparaissent pas, mais ils sont totalement reformulés par la naissance, confuse, chaotique, d’une sorte de système mondial ou peut-être de société mondiale. Sous l’effet de la multiplication des flux de toutes sortes, de la contraction de l’espace et du temps, de la prise de conscience par les hommes que le progrès technique menace leur survie même (anéantissement nucléaire, destructions de l’environnement), se constitue un espace planétaire. À cet égard, la concurrence économique illustre bien les évolutions en cours.
Pourquoi cette mondialisation des enjeux de la concurrence ?
Le déclencheur politique est la fin de la guerre froide. Avec l’écroulement du bloc soviétique et aussi l’échec — ou l’impasse — de toutes les expériences tiers-mondistes de développement autosuffisant (de la Chine maoïste à l’Inde de Nehru, du Mexique de la révolution institutionnelle à l’Algérie de Boumediene), il s’impose qu’il n’y a pas d’autre voie vers la modernisation que l’insertion dans les échanges internationaux, l’acceptation de la division internationale du travail. Tous les systèmes clos soit s’ouvrent volontairement (tout en tentant de maîtriser les implications politiques de cette ouverture : Chine de Deng Xiaoping, Vietnam…), soit se décomposent (Iran post-khomeyniste). En ces années 90, il n’existe pas d’autre solution élaborée à cette démarche. Les efforts frénétiques d’édification de zones économiques régionales — Association de libre-échange nord-américaine, Mercosur… —, dans le sillage de la construction européenne, sont conçus comme des actions d’apprentissage à la concurrence internationale. Même les courants les plus hostiles à l’Occident, comme les mouvements islamistes, s’inscrivent, en ce qui concerne la vie économique, dans la logique libérale.
En Occident même, mais aussi dans le monde en développement, cette reconnaissance de l’inéluctabilité de la concurrence a peu à peu déplacé les termes du débat. La privatisation des secteurs publics, la déréglementation, la souplesse des marchés (notamment du travail) ne sont plus contestées ; les discussions se bornent aux modalités à suivre, aux mécanismes d’accompagnement. La fin des grands monopoles nationaux (par exemple, électricité, téléphone…) va désormais de soi ; les États découvrent qu’en refusant les mutations en cours ils précipitent la chute de ces attributs de l’indépendance et de la grandeur nationales. Comment maintenir le monopole des télécommunications alors qu’il est vidé de toute substance par les multiples moyens qu’ont les agents économiques d’échapper à son emprise (sociétés de call-back permettant aux entreprises de se faire appeler des États où les tarifs sont les moins chers, et aussi recours à l’Internet) ?
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