Huit jours de voyage d’étude à Pékin et à Shanghai n’autorisent certes pas à émettre des avis valables sur les questions que pose le réveil de la Chine. Ils permettent cependant de recueillir des impressions sur le vif et de poursuivre tout au long du voyage des entretiens sans témoin avec tel ou tel officiel de l’escorte. Aussi bien les brèves notations qui vont suivre formeront-elles non un panorama mais une suite pointilliste d’images et de données recueillies, complétées ou nuancées sur place.

La première image retenue est, plus encore que la dimension de ces métropoles, leur modernisation accélérée. Celle-ci se poursuit tout au long de l’immense bordure côtière et fait tache d’huile vers l’intérieur du pays. Onze millions d’hommes vivent à Pékin et quatorze à Shanghai, cinquième ville du monde pour la population. L’envergure de leur effort d’équipement étonne tous les visiteurs, même prévenus. On les quitte convaincu que les rapports de force économique et politique dans le monde de demain, et encore plus dans celui d’après-demain, dépendront, presque autant que de la puissance américaine, du succès ou de l’échec de cette révolution tranquille. Il reste évidemment à souhaiter qu’elle comporte aussi une libéralisation des institutions.

La croissance économique

La grande affaire dont ne cessent de vous parler tous les interlocuteurs, militaires comme civils, est la croissance économique, considérée comme l’affaire de tous. Cette croissance est urgente : les autorités admettent que le revenu par tête, en 1996, n’excédait pas 580 dollars, soit un chiffre bien au-dessous de la barre mise par la Banque mondiale pour marquer la catégorie des pays pauvres (765). Elle est déjà remarquable : les mêmes autorités ajoutent aussitôt qu’elle a été en moyenne de 9,9 % de 1978 à 1996, de 7 % en 1997, et sera probablement aussi de 7 % en 1998. Elle est attendue : les prévisions font état de 7 % encore jusqu’en 2010, et l’on est fier de vous dire qu’en 2050 la Chine aura franchi la barre séparant les pays pauvres de ceux à revenu moyen.