Gendarmerie - La féminisation de la gendarmerie
Les récentes controverses grammaticales et protocolaires sur la féminisation de l’intitulé des fonctions et responsabilités publiques ont eu au moins pour intérêt de souligner combien, en cette fin de siècle, les attributs du pouvoir demeuraient, dans les rapports entre hommes et femmes, objets de résistances et de conservatismes, de discriminations et de convoitises. En affirmant que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme », le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 entendait pourtant abroger solennellement ce que le juriste Adhémar Esmein, dans ses Éléments de droit constitutionnel français et comparé (1927), avait appelé « la loi naturelle de la fondamentale division du travail » qui, depuis des lustres, reléguait la femme au seul rôle de mère et de ménagère. La féminisation des institutions policières et militaires ne devait cependant intervenir concrètement qu’à partir du début des années 70, sous la pression conjuguée des profondes mutations de la société française et de la volonté du législateur de rendre effective l’égalité des sexes dans la fonction publique (lois du 10 juillet 1975 et du 7 mai 1982).
L’annonce, le 30 novembre dernier, par le ministre de la Défense Alain Richard, de la suppression des quotas de recrutement pour les femmes, afin de tenir compte simultanément de « l’évolution générale de la femme dans la société » et des nécessités de la professionnalisation, apparaît, à cet égard, comme une étape décisive dans ce processus de féminisation des forces armées. En 1997, les femmes représentaient environ 7 % des effectifs des trois armées, de la gendarmerie et du service de santé. Par décret du 16 février 1998 (1), l’ensemble des quotas de recrutement a été supprimé (accès aux concours et aux spécialités). Selon les dispositions de ce texte, qui établit le principe de l’égalité d’accès des femmes et des hommes à la fonction militaire, il appartient désormais au ministre de la Défense de fixer par arrêté, pour chacune des composantes des forces armées, la liste des emplois qui ne peuvent être tenus que par des personnels masculins et, corrélativement à ces limitations d’emploi, le nombre de places mises au concours qui ne peuvent être offertes qu’aux hommes.
Entreprise au début des années 70, la féminisation de la gendarmerie a emprunté une démarche pour le moins progressive. À la brèche laborieusement creusée par la constitution d’un corps de personnels féminins chargés uniquement des tâches administratives (avec l’intégration, à partir de 1972, de volontaires du service national féminin et, depuis 1979, de personnels de la spécialité « emplois administratifs et d’état-major ») (2) a succédé, une dizaine d’années plus tard, une ouverture plus grande avec le recrutement d’officiers (effectif à partir de 1987) et de sous-officiers d’active. Conformément aux directives ministérielles, les décrets du 13 février 1983 devaient introduire dans les dispositions statutaires particulières des corps d’officiers et de sous-officiers de gendarmerie (décrets du 22 décembre 1975) la possibilité de procéder à un volume de recrutement féminin dans la limite de 5 % (porté ensuite à 7,5 % pour les sous-officiers) des recrutements annuels.
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