Asie - Indonésie : vers la démocratie ?
La crise économique a précipité la chute de Suharto et de sa dictature représentée par l’ordre nouveau, régime assez bien supporté aussi longtemps que la croissance économique fut au rendez-vous. Son dauphin et successeur, Jusuf Habibie, s’est démarqué de son mentor et s’est efforcé de corriger les principales erreurs de son prédécesseur. Il lui faut à la fois résoudre la crise financière, réformer les institutions et calmer les impatiences. L’armée est à ses côtés, mais saura-t-elle s’effacer le moment venu ?
Réélu à l’unanimité, le 10 mars 1998, par l’Assemblée consultative du peuple, le général Suharto a été contraint à la démission le 21 mai suivant, après trente-deux ans de règne sans partage. Depuis 1996, le régime s’était raidi et Suharto avait multiplié les erreurs (1). Ses louvoiements avec le Fonds monétaire international (FMI), les insupportables hausses des prix, la corruption, le népotisme effréné, l’étouffement de toute forme légale d’opposition ont conduit à une situation où le mécontentement social et politique ne pouvait s’exprimer que dans la rue. L’agitation, partie des principales universités, les enlèvements d’opposants, les émeutes de la faim, spontanées ou manipulées par le pouvoir, avaient amené le pays au bord de la guerre civile. Le dernier geste du dictateur a été de nommer son successeur, le vice-président Habibie.
Bacharuddin Jusuf Habibie, sexagénaire, est né dans l’île des Célèbes (Sulawesi). Il a travaillé dans l’aérospatiale en Allemagne où il a fait ses études. En 1974, Suharto, ami de longue date de sa famille, lui demanda de rentrer en Indonésie. Il est président de la compagnie de pétrole Pertamina, puis ministre des Sciences et Technologies en 1988, fonction dans laquelle il engage le pays dans des projets dispendieux, comme la fabrication d’un avion local. En 1990, il prend la direction de l’Association indonésienne des intellectuels musulmans, mouvement destiné à canaliser ces derniers au profit de Suharto. « Fils spirituel » de celui-ci, il est choisi comme dauphin malgré l’opposition d’une bonne partie de l’armée et du gouvernement, ainsi que par le mouvement Nahdlatul Ulama de Abdurrahman Wahid. Suharto l’impose cependant comme vice-président le 11 mars 1998.
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